Les violences jihadistes s'intensifient drastiquement dans le nord du Togo depuis le début de l'année 2025, avec des groupes islamistes infiltrant le territoire depuis le Burkina Faso voisin. Au moins 62 personnes ont été tuées dans 15 attaques depuis janvier, dont 54 civils et huit militaires, selon le ministre togolais des Affaires étrangères Robert Dussey.
Les autorités togolaises maintiennent un silence strict sur ces attaques pour "ne pas démoraliser" les troupes, selon une stratégie de "politique de verrouillage informationnel". La Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication a "expressément interdit aux journalistes d'évoquer les attaques, les pertes humaines ou matérielles, pour ne pas démoraliser les troupes engagées sur le terrain", explique le politologue togolais Madi Djabakate.
Escalade continue depuis 2022
Le bilan s'aggrave année après année : en 2023, le gouvernement avait reconnu plus de 30 morts dans des attaques "terroristes". Aucun chiffre officiel n'a été donné en 2024, mais le groupe de réflexion américain Security Council Report avance un bilan de 52 morts.
Le Togo a connu sa première attaque meurtrière en mai 2022, et depuis le pays "connaît sans véritable discontinuité des attaques et autres événements liés à des groupes jihadistes sur son territoire", indique Mathias Khalfaoui, spécialiste des questions de sécurité en Afrique de l'Ouest. "Il faut remonter à décembre 2022 pour trouver un mois qui, à notre connaissance, n'a pas d'attentats", précise-t-il dans une étude pour la fondation Konrad Adenauer.
Épicentre burkinabè du terrorisme
Comme son voisin le Bénin, le Togo fait face à l'intensification des violences liées à la situation sécuritaire dans l'est du Burkina Faso. En 2024, le Burkina Faso est le pays qui a enregistré le plus de morts dus au "terrorisme" pour la deuxième année consécutive avec 1 532 victimes, sur un total mondial de 7 555, selon l'Indice mondial du terrorisme.
La province burkinabè de la Kompienga, près de la frontière, abrite une puissante katiba du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans, affilié à Al-Qaïda. "Les frontières sont poreuses. Ce sont les męmes populations qui sont dans la Kompienga qu'on retrouve du côté du Kpendjal", explique Khalfaoui.
Extension géographique méthodique
La préfecture togolaise de Kpendjal, située à la frontière dans la région des Savanes, reste la plus touchée par les incursions. "Jusqu'en 2023, le danger était encore concentré sur les territoires directement limitrophes au Burkina Faso", note l'expert.
Mais "depuis mai 2024", les activités jihadistes se sont étendues plus au sud aux préfectures voisines d'Oti et d'Oti Sud. Cette avancée reste "lente et méthodique", ce qui peut faire passer inaperçue la progression des groupes armés.
Absence structurelle de l'État
La difficile situation sociale et économique des populations du nord contribue à la dégradation sécuritaire. "Les préfectures affectées, notamment Kpendjal et Kpendjal-Ouest, souffrent d'une absence structurelle de l'État. L'affectation de fonctionnaires dans ces zones est perçue comme une sanction, tant les conditions de vie sont difficiles et les services publics inexistants", confirme Djabakate.
Le politologue critique "la réponse essentiellement militaire et répressive" du Togo. En 2023, le pays a toutefois mis en œuvre le Programme d'Urgence des Savanes pour tenter d'améliorer les conditions de vie dans le nord, où l'état d'urgence est en vigueur depuis juin 2022.
Mobilisation militaire renforcée
Le gouvernement togolais a déployé environ 8 000 militaires dans le cadre de l'opération "Koundjoaré", lancée en 2018. Le budget de la défense a bondi de 8,7% des dépenses publiques en 2017 à 17,5% en 2022.
"Le Togo a réagi très vite. Mais ce sont des choses qui se bâtissent avec le temps", nuance Khalfaoui. Plusieurs observateurs estiment que seule une coopération régionale peut vaincre le jihadisme dans cette Afrique de l'Ouest divisée.
Sources utilisées : "AFP" Note : Cet article a été édité avec l'aide de l'Intelligence Artificielle.